Valentin Basile - Les Douze Clefs de la Philosophie


Auteur : Valentin Basile (Thölde Johann)
Ouvrage : Les Douze Clefs de la Philosophie
Année : 1600

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En ma préface (du traité de la génération des Planètes) je me suis obligé Ami Lecteur, en faveur de ceux qui sont curieux de science, et désireux de recherchée les secrets de la Nature, et enseigner (selon le moyen que Dieu m’en a donne) d’où, et de quelle matière nos ancêtres ont premièrement tiré, puis préparé la pierre triangulaire, donnée par la libéralité du souverain Dieu, (de laquelle ils se font servis pour entretenir leur santé durant le cours de cette vie mortelle, et pour saupoudrer comme de sel céleste les malheurs de ce monde :) Or afin que je tienne ma promesse, et que je ne t’enveloppe point dans les sophistications fallacieuses, mais que je monstre, comme l’on dit, depuis un bout jusqu’à l’autre, la source de tous biens : Sois attentif, et considère diligemment ce que je vais dire, (Si tu es désireux de science) car il ne me plais point à parler en vain, et telle n’est pas mon intention, que de me servir à cet effet de paroles frivoles, vue qu’elles ne servent de rien ; ou de bien peu pour apprendre ; bien au contraire, c’est tout mon but que de montrer en peu de mots des choses qui soient appuyées et fondées sur de bons fondements, et fondées sur des expériences très certaines. Or il faut savoir qu’encore que beaucoup se fassent accroire de pouvoir connaître cette Pierre fort peu néanmoins en viennent à bout, car Dieu n’en a communique la connaissance de l’opération qu’à for peu, et à ceux la principalement qui haïssent le mensonge, embrassent du tout la vérité, et qui s’adonnent aux Arts et sciences, et surtout à ceux qui l’aiment grandement, et lui demandent avec grande instance et prières ce précieux don. C’est pourquoi je t’avertis, si tu veux chercher notre Pierre, de suivre mon conseil, en premier lieu, prie Dieu qu’il favorise tes œuvres : et si tu sens ta conscience chargée de péchés, je te conseille de la décharger et nettoyer par vraie contrition et confession, et que tu te délibères de persévérer toujours en la vertu, afin que ton cœur soit conforme en tout bien, et ton esprit éclairé de la lumière de vérité : outre cela délibère en toi même, que si après avoir acquis ce don divin, tu es élevé en honneur, de tendre la main aux pauvres embourbez dans le limon de la pauvreté, refaire et restaurer de ta libéralité ceux qui sont rompus et lassés de malheurs, et relever de ces richesses les accablez de misère, afin que plus aisément tu aies la bénédiction de Dieu, et qui ta foi étant confirmée par les bonnes œuvres, tu puisses enfin jouir béatitude éternelle. Outre plus, ne méprise pas les livres des anciens Philosophes, qui pour le certain ont eu la Pierre devant nous, mais lis-les entièrement, car après Dieu ce sont ceux-là qui sont causes que je l’ai eut, lis les plus d’une fois, afin de n’oublier les principes, que les fondements te tombent, et que la lumière de la vérité ne soit éteinte. En outre, sois diligent à la recherche des choses qui s’accordent avec la raison, et avec les livres des anciens, ne sois point muable, mais vise constamment au but, auquel tirent et s’accordent tous les sages, et souviens-toi qu’un esprit mobile n’a point de pied stable, et qu’un Architecte de légère tète a grand peine peut bâtir un édifice ferme et permanent. De plus, ne prenant point notre pierre, son être et sa naissance de choses combustibles (veux qu’elle combat même contre le feu et soutient, sans être aucunement offensée, tous ses efforts et embûches) ne la tire point de telles matières, lesquelles la toute puissante nature ne la peut mettre. Par exemple ; si quelqu’un disait qu’elle est de nature végétale, ce qui néanmoins n’est pas possible bien qu’il apparaisse en elle, je ne sais quoi de végétable : car il faut que tu saches que si notre lunaire était de même nature que les autres plantes, elle ; ferrait aussi bien que les autres de matières propre au feu pour brûler et ne remporterait autre chose de lui que le sel mort, ou comme l’on dit la tête morte : et bien que nos devanciers aient écrit bien amplement de la Pierre végétable, toutefois si tu n’es plus clairvoyant que Lincée, crois moi, cela surpassera la portée de ton esprit, car ils l’ont seulement appelé végétable, pour ce qu’elle croit, et se multiplie comme une chose végétable. Bref, sache que pas un animal ne peut étendre son espèce et engendrer son semblable, s’il ne le fait par le moyen de choses semblables, et d’une même nature, voilà pourquoi je ne veux point que tu mettes peine à chercher notre Pierre autre part, n’y d’autre côté que dans la semence de sa propre nature, de laquelle la nature l’a premièrement produite. Tire de là aussi une conséquence certaine, qu’il ne te faut aucunement choisir à cet effet un nature animale, car comme la chair et le sang ont été donnez par le Créateur de toutes choses aux seuls animaux, aussi du seul sang, à eux seul particulier, eux seuls sont nés et naissent tous les jours. Mais notre Pierre que j’ai eu par succession des anciens Philosophes, est faite et composée de deux choses, et d’une, en qui la troisième est cachée, et elle est la vérité vraiment publiée sans aucune ambiguïté et fraude, car le mari et la femme n’étaient pris par les anciens Philosophes que pour un même corps, non pas à cause de ses accidents externes qu’ils eussent, mais à cause de leur amour réciproque, et la vertu uniforme produite de leur semblable, née et inférée à l’une et à l’autre, dès leur première naissance. Et tout ainsi qu’ils ont une vertu conservative et propagative de leur espèce, tout de même la matière de laquelle est produit notre Pierre, se peut multiplier et étendre par la vertu séminale qu’elle a. C’est pourquoi si tu es vrai amateur de notre science, tu ne feras pas peu d’estime de ce que je viens de dire, et tu le considéreras attentivement, de peur de te laisser tirer avec les autres sophistes, aveuglés en cet endroit en la fosse d’ignorance, et te précipiter en ce gouffre, et enfin n’en pouvoir jamais revenir. Or mon ami, afin que je t’enseigne d’où cette semence, et cette matière est puisée, songe en toi même à quelle fin et usage tu veux faire la Pierre, alors tu saura qu’elle ne s’extrait que de racine métallique, ordonnée du Créateur à la génération seulement des Métaux. Or comprend en peu de paroles comment cela se fait. Au commencement ; alors que l’esprit du Seigneur était porté sur les eaux, et que toutes choses étaient enveloppées dans les obscurités ténébreuses du Chaos, alors Dieu puissant et Eternel, commencement sans fin, la sagesse duquel est dès le commencement, et dès l’Eternité, par ses conseils inscrutables et providents, créa de rien le Ciel et la terre, et tout ce qui est en iceux contenu visible et invisible, quel nom que tu leur baille ou leur puisse bailler. Car Dieu fit toutes choses de rien. Or comment fut faite cette merveilleuse création, j’estime que ce n’est ici le lieu de s’en enquêter car telles matières doivent être plutôt confirmées par la foi et par la sainte Ecriture. En cette création Dieu donna et comme versa à chaque nature de peur qu’elles ne périssent, étant sujettes à corruption, à chacune sa semence, afin que par telle vertu séminale elle se puisse garantir de mort, et que les hommes, les animaux, les plantes et les métaux, puissent être perpétuellement conservés, et ne fut pas donné à l’homme telle vertu, que de pouvoir à son plaisir, contre la volonté de Dieu, faire de nouvelles semences, mais seulement lui permis de pouvoir étendre et multiplier son espèce. Et Dieu se réserva la puissance de faire de nouvelles semences, autrement la création serait possible à l’homme, comme étant la plus noble créature, ce qui ne se peut pas faire, mais doit être réservée au seul Créateur de toutes choses. Quant à la vertu séminale des Métaux, je veux qu’ainsi tu la connaisses. Premièrement l’influence céleste par la volonté et commandement de Dieu, descend d’en haut, et se mêle avec les vertus et propriétés des Astres, d’icelles mêlée ensemble, il se forme comme un tiers entre-terrestre. Ainsi est fait le principe de notre semence, et telle est sa première production, par laquelle elle peut donner assez suffisant témoignage de sa race. De ces trois se font les éléments, à savoir l’Eau, l’Air, et la Terre, lesquels moyennant l’aide du feu, continuellement appliqué, l’on régit et gouverne jusqu’à ce qu’ils aient produit une âme qui ait moyenne nature entre les deux, un esprit incompréhensible, et un corps visible et corporel. Quand ces trois principes sont joints ensemble par vraie union, ils sont par continuation de temps, et par le moyen du feu dûment appliqué, une substance sensible ; savoir est, la Mercuriale, la Sulfureuse et la Saline, que Hermès et tous les autres devant moi, ne pouvant par delà dès le commencement du Magistère, ont appelé les trois principes, lesquels s’y étant mis proportionnellement, l’on coagule, selon les diverses opérations de nature, et la disposition de la semence, ordonnée de Dieu à cet effet. Quiconque donc se propose de chercher la source de cette salubre fontaine, et espère de remporter par un combat désiré, le prix de ce noble Art, qu’il me croie, attestant le Souverain Dieu de cette vérité, que la part où se trouvent l’Ame Métallique, l’Esprit Métallique, et le corps Métallique, s’y trouvent aussi infailliblement, l’Argent vif, le Soufre et le Sel Métallique, lesquels nécessairement ne sauraient faire qu’un corps parfait Métallique. Si tu ne veux pas entendre ce qu’il te faut apprendre ; ou tu n’auras jamais été élevé dans l’école de la sagesse, ou tu ne seras pas enfant de science, ou bien Dieu t’estimera indigne et incapable de telle doctrine. Je te dis donc en peu de mots qu’il te sera impossible de tirer aucun profit félicité des matières métalliques, si tu n’assembles exactement en une forme métallique ces trois principes. Avec cela il faut que tu saches que non seulement l’homme, mais aussi tous les autres animaux terrestres, composés de chair et de sang, sont doués d’Ame et d’esprit vital, qu’ils sont dépourvus néanmoins d’entendement, qui est à l’homme seul particulier. C’est pourquoi quand ils ne sont plus en vie, l’on n’en saurait rien tirer de bon, tout étant mort en eux. Mais quand l’Ame de l’homme est contrainte par la mort et par la disjonction d’avec le corps, de retourner à son Créateur d’où elle est venue, elle vit toujours, et enfin retourne habiter avec le corps purifié et clarifié par le feu, de telle façon que l’Ame, l’Esprit et le Corps, s’illuminent l’un l’autre d’une certaine clarté céleste, et s’embrassent de telle sorte que jamais puis après ils ne peuvent être désunis l’un l’autre. Voilà pourquoi l’homme doit être, à cause de son âme, estimé créature fixe, d’autant que (bien qu’il semble mourir) il vivra perpétuellement, la mort de l’homme à cause de cela, n’est autre chose qu’une clarification, par laquelle (devant que passer comme par certains degrés ordonnés de Dieu) il doit après avoir quitté cette vie mortelle, vivre plus noblement, et d’une vie immortelle. Ce que n’étant ainsi des autres animaux, l’on les doit estimer créature non fixe, car après la mort ils n’ont aucune espérance de ressusciter et revivre, pour ce qu’ils sont dépourvus d’Ame raisonnable, pour laquelle a enduré et répandu son précieux sang, le vrai médiateur et unique fils de Dieu. A la vérité si l’esprit peut habiter l’Ame et le corps, il ne s’enfuit pas néanmoins qu’ils soient liés ensemble, bien qu’ils soient en paix, et ne soient en rien discordant l’un de l’autre, car ils ont encore besoin d’un lien plus fort, à savoir de l’Ame pure, noble et incompréhensible, qui les puisse tous deux lier fermement, les garantisse de tous dangers, et défende contre tous les ennemis. Car où l’Ame s’est départie et est du tout éteinte, n’y a plus de vie en cet endroit, et n’y a aucune espérance de la recouvrer, voilà pourquoi une chose sans Ame est grandement imparfaite, et voici un grand secret, et que doit nécessairement savoir le sage qui cherche notre Pierre, ma conscience m’a obligé à ne passer sous silence un tel mystère, mais le découvrir aux amateurs de notre science. Pèse donc diligemment mes paroles, et apprends que les esprit qui sont cachés dans les métaux diffèrent beaucoup l’un de l’autre, l’un étant plus volatil, l’autre plus fixe, la même différence se trouve en leur Ame, et en leur corps. Tout métal donc qui est composé de tels esprits vraiment fixes (ce qui est donné de particulier au seul Soleil) a une grande force et vertu, par laquelle il combat même contre le feu. , et par sa puissance surmonte tous ses ennemis. La Lune a en soi un Mercure fixe, par lequel elle soutient plus longuement la violence du feu que les autres métaux imparfaits, et la victoire qu’elle remporte, montre assez combien elle est fixe, vu que le ravissant Saturne lui peut rien ôter ou diminuer. La lascive Vénus est bien colorée, et tout son corps n’est presque que teinture, et couleur semblable à celle qu’a le Soleil, laquelle à cause de son abondance, tire grandement sur le rouge, mais d’autant que son corps est lépreux et malade, la teinture fixe n’y peut pas faire sa demeure, mais le corps s’envolant, nécessairement la teinture doit suivre, car icelui périssant, l’Ame ne peut pas demeurer, son domicile étant consommé par le feu, n’apparaissant et ne lui étant laissé aucun siège, et refuge, laquelle au contraire accompagnée demeure tout avec un corps fixe. Le sel fixe, fournit au guerrier Mars un corps dur, fort, solide et robuste, d’ou provient sa magnanimité et grand courage. C’est pourquoi il est grandement difficile de surmonter ce valeureux Capitaine, car son corps est si dur, qu’a grand peine on le blesser. Mais si quelqu’un mêle sa force et dureté avec la constance de la Lune et la beauté de Vénus, et les accorder par un moyen spirituel, il pourra faire, non point tant mal à propos une douce harmonie, par le moyen de laquelle le pauvre homme s’étant servi à cet effet de quelques clefs de notre Art, après avoir monté au haut de cette échelle, et parvenu jusqu’à la fin de l’oeuvre, pourra particulièrement gagner sa vie, car la nature flegmatique et humide de la Lune peut être échauffée et desséchée par le sang chaud et colérique de Vénus, et sa grande noirceur corrigée par le Sel de Mars. Il ne faut pas que tu cherches cette semence dedans les éléments, car elle n’est pas si éloignée de nous, mais la nature nous l’a mise bien plus près, et tu l’obtiendras, si tu rectifie tellement le Mercure, le Soufre et le Sel (j’entends des Philosophes) que l’Ame, l’esprit et le corps soient si bien unis qu’ils ne se puissent jamais quitter, alors sera fait le vrai lien d’amour, et sera bâtie la maison de gloire et d’honneur. Et saches que tout ceci n’est rien autre chose que la clef de la vraie Philosophie, semblable aux propriétés célestes, et l’eau sèche conjointe avec une substance terrestre, toutes lesquelles choses reviennent toujours à même point, comme n’étant qu’une même, qui prend son origine de trois, de deux et d’une. Si tu frappes ce but et parviens jusque là, sans doute tu as accompli le magistère. Joints par après l’époux avec l’épouse, afin qu’ils soient nourris de leur chair et sang propres et soient multipliés par leur semence à l’infini, et encore que par charité je voulusse bien t’en dire d’avantage de peur néanmoins de passer les bornes que Dieu m’a limitées, je n’en parlerai pas d’avantage, ni plus amplement, craignant que l’on abuse des grands dons de Dieu, et que je sois l’auteur et cause de tant de méchancetés qui se commettraient et d’encourir l’ire divine, et ne sois condamné avec les méchants, aux peines éternelles. Mon ami, si ces choses sont si obscures que tu n’y puisses rien comprendre, je t’enseignerai encore ma pratique, par le moyen de laquelle j’ai fait avec l’aide de Dieu, la pierre occulte, considère là diligemment, prend bien garde aux douze Clefs, et les lis plus d’une fois, puis travaille selon que je t’ai instruit, à vérité elle est un peu obscure, mais au reste fort exacte. Prends de bon or, mets en pièces et dissout comme enseigne la nature aux amateurs de science, et le réduit en ses premiers principes, comme le Médecin a coutume de faire dissection d’un corps humain pour connaître ses parties intérieures, et tu trouveras une semence qui est le commencement, le milieu et la fin de l’oeuvre, de laquelle notre or et sa femme sont produits, savoir est un subtil et pénétrant esprit, une âme délicate, nette et pure, et un Sel et baume des Astres, lesquels étant unis ne sont qu’une liqueur et eau Mercurielle. L’on mena cette eau au Dieu Mercure son père, pour être examinée, et la voulut épouser, et de fait l’épousa, et se fit d’eux une huile incombustible, puis Mercure devint si orgueilleux et superbe, qu’il ne se reconnu plus pour soi même, mais ayant jeté ses ailes d’Aigle, il dévora sa queue glissante d’un dragon, et déclara la guerre à Mars, incontinent Mars ayant assemblé sa compagnie de chevaux légers, fit prendre Mercure, le mit prisonnier, et constitua Vulcain pour Geôlier de sa prison, jusqu’à c qu’il fut derechef délivré par le sexe féminin. Tout aussitôt que le bruit fut su par le pays, les autres planètes s’assemblèrent et consultèrent de ce qui était de faire dorénavant, afin que tout fut gouverné avec prudence et maturité de conseil, alors Saturne avec une gravité non pareille commença en cette façon à dire le premier son avis. Moi Saturne, le plus haut des planètes, confesse et proteste devant vous que je fus le moindre de toutes, ayant un corps faible et corruptible, de couleur noire, soumis à toutes les adversités de ce misérable monde. C’est moi toutefois qui éprouve toutes vos forces, parce que je ne saurai demeurer en une place, et m’envolant j’emporte tout ce que je trouve de semblable à moi. Je rejette la faute de cette mienne calamité sur autre que sur Mercure, qui par sa négligence et peu de soin, m’a causé tous ces malheurs. C’est pourquoi je vous prie, et conjure toutes, de prendre sur lui vengeance de cette mienne misère, et parce qu’il est déjà en prison, que vous le mettiez à mort, et le laissiez tellement corrompre et pourrir, qu’il ne lui reste aucune goutte de sang. Après Saturne, se vint à lever Jupiter tout chenu et cassé de vieillesse, lequel ayant fait révérence, et étendu son sceptre, salua chacun selon sa qualité, et ayant fait une petite préface, loua l’avis de son compagnon Saturne, et voulut que tous ceux qui ne trouveraient pas bonne cette opinion fussent proscrits et exilés, et ainsi finit son discours. Par après s’avança Mars avec une épée nue diversifiée d’admirables couleurs (vous eussiez dit qu’elle était entrelacée comme de miroirs jetant feu et flamme, à cause des rayons et par ça et là sortant d’icelle) et la donna à vulcain Geôlier de la prison, pour exécuter la sentence prononcée, et réduire en cendre les os de Mercure, après qu’il serait mort. Vulcain lui obéit incontinent comme exécuteur de justice, prêt à faire ce qu’on lui commandait. Or après que Vulcain se fut acquitté de son devoir, l’on vit venir comme une belle femme blanche, et vêtue d’un habit à femme long, de couleur grise et argentine, tissu et entrelacé de beaucoup d’eau, et après l’avoir les assistant considérèrent de plus près, il connurent tous que c’était la Lune, l’épouse du Soleil, laquelle se jeta à leurs pieds, et après plusieurs soupirs accompagnés de larmes, avec une voix tremblante et entrecoupée de beaucoup de sanglot, pria que l’on délivra le Soleil son mari, emprisonné par la fraude et tromperie de Mercure, qu’il faudrait autrement qu’il périsse avec Mercure, déjà condamné à mort par le jugement des autres planètes. Mais Vulcain sachant bien ce qu’il aurait à faire, et ce qui lui avait été ordonné, boucha l’oreille à ces prière, et ne cessa d’exécuter la sentence sur ses pauvres criminels, jusqu’à ce que vint Vénus vêtue d’une robe bien rouge, doublée de vert, extrêmement belle de visage, avec une voix douce et courtoise, une contenance et façon de faire du tout agréable, portant un bouquet de fleurs odoriférantes, qui à cause de l’admirable diversité de couleurs qu’elles avaient, apportaient un merveilleux contentement aux hommes. Elle pria en langue Caldaïque Vulcain, qu’il délivre le Soleil, et le fit ressouvenir qu’il devait être racheté et délivré par le Sexe féminin, mais tout cela pour néant, car il avait les oreilles bouchées. Comme ils parlaient ensemble, le Ciel s’ouvrit, et en sorti un grand animal avec, et un infinité de petits, lequel tua Vulcain, et à gueule ouverte dévora la noble Vénus qui priait pour lui, et cria à haute voix, les femmes m’ont engendré, les femmes ont semé et épars par toute semence et ont rempli le monde, et leur âme est unie avec moi, c’est pourquoi aussi vivrai de leur sang, ayant dit cela à haute voix, il se retire, accompagné de tous ses petits en une chambre, ferma la porte, et mangea bien d’avantage que de coutume, bu sa première incombustible, et digéra bien plus aisément son boire et manger, et créa beaucoup de nombre infini de ses petits, et cela se fit tant de fois que tout le monde en fut rempli. Tout ceci s’étant passé de la façon, plusieurs doctes gens du pays s’assemblèrent, et se mirent ensembles à chercher le moyen de connaître ce mystère, pour avoir plus parfaite connaissance de ce fait, mais ne s’accordant point ensemble, ils se travaillaient pour néant, jusqu’à ce qu’on vit venir un vieillard qui avait la barbe et les cheveux aussi blancs que neige, il était vêtu d’écarlate depuis les pieds jusqu’à la tête, avec une couronne d’or entrelacée de pierres précieuses de grande valeur. En outre il était ceint d’une ceinture de toute gloire et bonheur, et marchant nus pieds, il parlait par un singulier esprit qui était en lui, ses paroles pénétrèrent tout son corps et de telle façon que son Ame s’en sentait, cet homme s’élevait un peu plus haut que les autres, et il fallait faire silence aux assistants, et parce qu’il était envoyé du Ciel pour déclarer et expliquer par discours physique la susdite parabole et énigme, il les admonesta de prêter les oreilles ouvertes, et l’écouter patiemment. Ayant donc obtenu silence, il commença ainsi son discours. Eveille-toi peuple mortel et regarde la lumière, de peur que les ténèbres et obscurités ne te trompent, les Dieu du bonheur, et les grands Dieux m’ont révélé ceci en dormant ! O qu’heureux est celui qui a les yeux éclairés pour voir la lumière qui lui était cachée auparavant, il s’est levé par la bonté des Dieux deux étoiles aux hommes, pour chercher la vraie et profonde sagesse : regarde les et marche à leur clarté, parce que l’on y trouve la sagesse. Un oiseau Méridional rapide et léger arrache le cœur du corps d’un grand animal d’Orient, l’ayant arraché le dévore, baille aussi des ailes à l’animal d’Orient afin qu’ils soient semblables, car il faut que l’on ôte à la bête Orientale sa peau de Lion, et que derechef ses ailes disparaissent, et qu’ils entrent dans la grande mer salée, et en sortent derechef ayant pareille beauté, alors jette ses esprits remuant dans un puits bien creux ou l’eau ne tarisse jamais afin qu’ils luis soient rendus semblables, comme leur mère qui y est cachée, et en a été composée, et pris sa naissance des trois. La Hongrie m’a premièrement engendrée, le Ciel et les Astres me nourrissent, la terre m’allaite. Et bien que je meure et soit enterré, je prends néanmoins vie et naissance par Vulcain, c’est pourquoi la Hongrie est mon pays, et la terre qui contient toutes choses est ma mère. Les assistants ayant entendu cela, il commença encore à parler. Fait que ce qui est dessus soit dessous, que le visible soit invisible, le corporel incorporel, et fait derechef que ce qui est dessous soit dessus, l’invisible rendu visible, et l’incorporel corporel, et de cela dépend entièrement toute la perfection de l’art, où néanmoins habite la mort et la vie, la génération et corruption : c’est une boule ronde où se tourne l’inconstance roue de fortune, et apporte aux hommes divins toute sagesse et bonheur, l’on l’appelle de son propre nom toute chose ; Dieu toutefois est souverain, et a seul commandement sur les choses éternelles. Or celui qui sera curieux de savoir ce que c’est que toute choses dans toutes choses, qu’il fasse à la terre de grande ailes, et la rencogne et la presse tellement qu’elle monte en haut et vole par dessus toutes les montagnes, jusqu’au firmament, alors qu’il lui coupe les ailes à force de fer, ainsi qu’elle tombe dans la mer rouge et s’y noie, puis fasse calmer la mer, et dessèche ses eaux par feu, et par air, afin que la terre renaisse, et en vérité il aura tout dans toutes choses, et s’il ne le peut trouver, qu’il regarde dans son propre sein, et cherche et visite tout ce qui est alentour de lui, et en tout le monde il trouvera tout dans tout ; ce qui n’est rien autre chose qu’une vertu stiptique et astringente des métaux et minéraux, provenant du Sel et du Soufre, et deux fois née du Mercure. Je te Jure que je ne saurais te déclarer plus amplement toutes choses dans toutes choses, vu que toutes choses sont comprises en toutes choses. Ayant achevé ce discours, mes amis (dit-il) je crois qu’en attendant ainsi la sagesse, vous avez appris et colligé de cette mienne harangue, de quelle matière, et par quel moyen vous devez faire la Pierre précieuse des anciens Philosophes. Or cette notre Pierre ne guérit pas seulement les Métaux lépreux et imparfaits, et par régénération les réduit et convertit en une nature du tout accomplie, mais aussi conservant la santé des hommes, et les fait vivre longuement, et par sa céleste vertu m’a conduit à telle vieillesse que m’ennuyant de vivre si longuement je voudrai déjà quitter le monde. A Dieu en soit la louange, l’honneur, la vertu, la gloire, aux siècles des siècles, pour la grâce et sagesse qu’il y a si longtemps qu’il m’a de sa libéralité donnée. Ainsi soit-il. Ayant dit cela, il disparut de leurs yeux et s’envola en l’air. Ces choses étant passées de la façon, chacun s’en retourna d’où il était venu, et banda tout chacun son esprit, et opéra selon la sagesse que Dieu lui avait donnée. ...

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