Auteur : Daudet Léon
Ouvrage : Les Dicts et pronostiquations d'Alcofribas Deuxième pour le bel an MCMXXII
Année : 1922
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Et doncque, cest matin-là, doré à souhait par Apollo, dont flèches, lances et carreaux esilammés brillaient dessus multiturbe populaire, entra Millerandus es ville mont-peière, suivi et accompaigné de Berardus-es-humanitates, docte et inclyte, ains juvénile, du Redu, de Marraud le bien nommé, de Febur du Prat ou du Pré, et de maints petits godaillons, attachez à basques de menistres, comme souriceaux à tartines beurrées. Estoit Aristidès au delà de l'eau, et soy mesme poisson scatophage, accompaigné de suite d'autre sorte et de ces petictes jeunesses à vive allure, qui font musique sans musique, emmy leurs dactyles. Demourait en ville lutécienne Bonnevoie, — dont la voie est pourtant mauvoise — toussant et veyssant et pétant es balances et sceaux de dame Thémis, etfortaplaty devant ces gens rouges, auxquels commande capitaine Herriotus, lui-même soumis à capitaine Buoncour, lequel tient pour Cymbat dit « Sembat », qui suyt docilement Cachinet moscovite. « Holà, fit xMillerandus à son Redu, que dis-tu, aniy, de ces oriflammes et contentements populaciers ? Bien coyon qui n'en tirerait liesse et biau discours et harangue en bonne forme, si que faisions en Palais de Jus et Juris, à chatière de Grippeminaud, devant que présidiyons la Chose publique. —Oïe, fit Redu, ce tandis que Febur du Prat ou du Pré, approvant à la mode libérale, riait de biais, et finement lissait sienne mostache longue, acérée, cosméticante. —Demesmeadvis » opina Marraud, qui nyaguère décora Truy dict Téry, dessus tétines, pour excellence à services foireux et aultres, segrètement rendus à l'Aristidès. — Sy pensoi-je », rioit Berardus, fort diverty par soleil ardé et contentement ; tandis que bons Languedociens, issus de rues, maisons, quadrivies, villes, villages et villetons, vignobles, chaussées, cabanes, capitaineries et seigneuries, quelques uns mesme de fort petite extrace, besogne et condition, mais ruisselans du jus de la treille, laquelle est, en ce pays du bon Dieu, espécialement dorée, drue, abondante et juteuse, jetaient, dys-je, en Tair bonnets de couleur, clamant de vénérer haults personnaiges venus de si loin et tout exprès. Un peu plus au large de là, bonnets quarrés d'Académie, de doyens et abstracteurs de quintessence, voyre ouvrant cadavres médicalement, à recherche et queste d'âmes déjà esvolées, s'esbaudissaient de tel cortège, d'où pleuvent croix, rubans, rosettes, rosaces, bandaiges d'honneur et avancements, à mesure non tant de mérite ou sçavoir, comme de salamalecs et docilité. ...
Aubert Edouard - La vallée d'Aoste
Auteur : Aubert Edouard Ouvrage : La vallée d'Aoste Année : 1860 Lien de téléchargement :...