Vaquié Jean - Les Manifestes Rosicruciens


Auteur : Vaquié Jean
Ouvrage : Les Manifestes Rosicruciens
Année : 19**

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L'adjectif "rosicrucien" qualifie tout ce qui concerne la Rose-Croix. Et le substantif "rosicrucianisme" désigne la doctrine en usage dans la Rose-Croix. Mais qu'est-ce donc que cette mystérieuse et fameuse Rose-Croix ? Si l'on s'en tient à la simple emblématique, la Rose-Croix est l'association d'une rose et d'une croix. C'est une rose placée au centre d'une croix, originellement au centre d'une croix latine, par la suite au centre de toutes sortes de signes cruciformes. Quoi de plus chrétien que la rose et que la croix ? La rose est l'un des emblèmes de la Mère de Dieu, laquelle, dans les litanies qui lui sont consacrées, est saluée du nom de "Rose Mystique", avec le sens, simple et évident, de beauté cachée. Les éléments constitutifs de l'emblème rosicrucien sont donc d'origine chrétienne, cela ne fait aucun doute. Mais c'est l'association de ces deux éléments constitutifs qui a donné lieu à une nouvelle convention. Nouvelle convention qui est beaucoup moins chrétienne que les éléments constitutifs pris isolément. Or, de fait, la rose et la croix associées recouvrent toujours une intention de détournement du christianisme institutionnel. Historiquement la "rose-croix" a été choisie comme pavillon par une société de pensée dont nous allons voir les premières manifestations et dont le dynamisme est tout entier dirigé vers la réformation universelle, c'est à dire dans le sens du renversement des institutions historiques chrétiennes et dans le sens de leur remplacement par autre chose. Autre chose qu'il s'agit précisément d'élaborer. Le pavillon rosicrucien est chrétien dans ses apparences, mais la marchandise qu'il couvre ne l'est pas. Trois coups de clairons teutoniques ont brusquement annoncé, dans les premières années du XVIIè siècle, l'existence, que l'on soupçonnait vaguement d'ailleurs, de la Fraternité de la Rose-Croix. Ces trois coups de clairons, ce sont les trois Manifestes rosicruciens que nous allons étudier maintenant. Et s'ils prennent place dans notre enquête sur les doctrines révolutionnaires, c'est précisément parce qu'ils ont inauguré, sur un certain plan tout au moins, la phase de la réformation politique. La "Réformation" luthérienne avait été surtout religieuse. La "Réformation Universelle" qu'entreprennent bruyamment les frères de la Rose-Croix s'étend à la philosophie, à la science et à la politique des États. Examinons tout cela. Quels sont donc ces trois manifestes dont le ton fut si tonitruant ? Le premier s'intitule la Fama Fraternitatis et date de 1614. Le second est la Confessio Fraternitatis et il a été publié l'année suivante, 1615. Le troisième a pour titre Les Noces Chymiques de Christian Rosenkreutz, édité en 1616. Pour situer dans le temps les Manifestes rosicruciens, il faut se souvenir qu'à l'époque de leur publication (1614- 1616), Luther était un homme du passé récent, mort en 1546 voilà 70 ans, tandis que Cromwel était un homme de l'avenir donc un homme encore inconnu, sa république devant dater de 1653, c'est à dire 37 ans plus tard. Voilà l'encadrement chronologique et événementiel des Manifestes que nous avons maintenant à analyser, sans plus tarder. La fama fraternitatis d'abord, puisque c'est le premier en date. Nous sommes donc en 1614 dans le Wurtemberg, c'est-à-dire entre la province de Bade, qui couvre la Forêt-Noire, et le Royaume de Bavière. Et nous sommes à l'Université de Tübingen. Sur certaines éditions, le titre du premier Manifeste est gravé dans un médaillon entouré de guirlandes à la manière du XVIIè siècle commençant : fama fraternitatis ou confrérie du très louable ordre de la Rose-Croix. 1614. Il n'y a ni nom d'éditeur, ni nom de ville d'origine. Simplement la mention Würtemberg. Et il n'y a pas non plus de nom d'auteur. Mais, mis à part quelques suppositions qui furent rapidement abandonnées, on soupçonna unanimement Valentin Andrea d'être le rédacteur de la Fama. Ce Valentin Andrea était un jeune pasteur luthérien de moins de trente ans, très connu par ailleurs, parce que très dynamique, très remuant et même très aventureux. Fama est un mot latin qui signifie renommée, gloire. Le ton est emphatique, dès le titre et il va le rester jusqu'à la fin. Le document se donne comme une déclaration solennelle qui s'adresse aux Princes et aux autorités de la science : "Nous, frères de la Fraternité de la Rose-Croix, dispensons notre salut, notre amour et nos prières aux régents, aux ordres, aux hommes savants et à tout homme qui lit notre écho dans une intention chrétienne." On va en effet nous exposer une certaine forme du Christianisme. Mais ce sera un christianisme libre, un christianisme insatisfait et frondeur. Bref, ce sera un christianisme révolutionnaire. Le texte retrace les circonstances qui justifient cette solennelle déclaration : "Dieu a présentement favorisé la naissan-ce d'esprits hautement éclairés qui ont pour mission de rétablir dans ses droits l'art (nous dirions la culture, la civilisation) en partie souillé et imparfait, afin que l'homme achève de comprendre à la fois la noblesse et la magnificence qui sont les siennes et sa condition de microcosme, et encore la profondeur de ses possibilités dans la pénétration de sa propre nature". La Fama nous annonce donc une réforme de la philosophie qui va enfin nous aider à comprendre notre état et notre statut d'être humain, état et statut dont l'intelligence profonde nous échappe jusqu'à présent. Et le texte continue : "Or Dieu a gratifié notre siècle par une foule de révélation, par le livre de la nature et par la règle de tous les arts". Autre-ment dit, le progrès qui c'est récemment manifesté dans toutes les sciences annonce une rénovation complète de la civilisation. Voici maintenant la présentation du génial philosophe qui est le fondateur de l'ordre de la Rose-Croix au nom duquel la déclaration est faite : "Aussi a pris naissance le projet d'une réformation universelle auquel notre défunt Père Christian Rosenkreutz, esprit religieux et hautement illuminé, Allemand, chef et fondateur de notre Fraternité, a consacré de grands et longs efforts." Et la déclaration préliminaire se termine par des considérations un peu alambiquées que l'on peut résumer ainsi : il n'est plus temps de s'en tenir aux anciens dogmes, il faut au contraire réviser ses connaissances, pour repartir sur des bases nouvelles. Nous tenons là la quintessence de l'intention qui va être développée par la suite : une réformation universelle qui sera le prolongement de la réformation plus proprement religieuse de Luther. Ce sera une réformation de la science et de la philosophie puisque la Fama s'adresse aux notoriétés intellectuelles ("les ordres"). Et ce sera aussi une réformation de la politique des États puisque ce même document s'adresse aux "régents", c'est-à-dire aux Princes. Nous en avons fini avec les considérations préliminaires, avec les "généralités". Elles sont relativement courtes mais elles condensent bien les intentions de l'auteur. Après cela, tout le reste de ce premier "manifeste" va être consacré à la biographie du fondateur de la Fraternité de la Rose-Croix, Christian Rosenkreutz. On ne tarde pas à se convaincre que ce Christian Rosenkreutz est un personnage mythique. Mais c'est aussi un per-sonnage typique. Il présente tous les traits communs à ces illuminés gyrovagues qui, à la fin du moyen-âge, se mêlant aux étudiants sérieux, sillonnèrent la Chrétienté et périgrinèrent d'Université en Université, soit pour écouter des cours, soit pour en donner eux-mêmes. Un des modèles les plus accomplis de cette sorte de personnages est incontestable-ment Paracelse que précisément Valentin Andrea, l'auteur de la Fama, prend explicitement comme exemple. Paracelse est un médecin et un alchimiste Suisse qui a réellement existé. Il a vécu au début du XVIè siècle, de 1493 à 1541, donc 73 ans avant la publication de la Fama. Nous allons le retrouver tout à l'heure, mais écoutons Valentin Andrea nous raconter la vie mythique et typique de Christian Rosenkreutz. Entrons donc dans la "Chanson de geste rosicrucienne" qui va nous rappeler, sous bien des rapports, les Romans et les Poèmes du cycle du Graal ; elle nous rapellera surtout, évidemment, les romans graaliens de la deuxième génération, non pas ceux de Chrétien de Troyes dans lesquels l'inspiration chrétienne est encore prédominante, mais ceux de Wolfram von Eschenbach où c'est l'influence arabe qui l'emporté. Christian Rosenkreutz serait né en 1378. Ses parents, nobles et pauvres, comme il se doit, le confient à des religieux qui lui dispensent une instruction soignée, lui apprenant le latin et le grec. Il est bien évident que cet enfant prédestiné se montre d'une extrême précocité. Il est difficile qu'il en soit autrement. Dès que ses forces le lui permettent, il part en pèlerinage au saint sépulcre, accompagné par un des religieux du collège où il a été élevé. Mais voilà qu'à l'escale de Chypre, le religieux accompagnateur tombe malade et meurt. Les liens que rattachent le jeune homme à la religion institutionnelle viennent de se rompre. Christian Rosenkreutz, qui a atteint sa pleine maturité intellectuelle et qui n'a plus besoin de son mentor, continue seul son pèlerinage. Cependant, au lieu d'aller directement à Jérusalem, il marque un long arrêt dans une ville de Turquie où il gagne sa vie en exerçant la médecine, malgré son jeune âge, que Valentin Andrea semble avoir un peu oublié. C'est dans cette ville de Turquie qu'il entend parler, pour la première fois, des sages de damcar et des révélations qui leur ont été faites sur la nature toute entière. Voila donc des "Sages", notons le en passant, qui reçoivent des révélations, non plus sur les choses surnaturelles, comme les saints du christianisme, mais sur les choses de la nature. Ne soyons pas trop regardants sur l'origine de ces "révélations". Il n'en faut pas plus à Christian Rosenkreutz pour se détourner de son pèlerinage au Saint Sépulcre. Il prend une bifurcation tout à fait symptomatique de l'état d'esprit qui va désormais le régir : il part pour la ville de Damcar et on ne nous reparlera plus du Saint Sépulcre. Quelle est donc cette ville de Damcar ? S'agit-il de Damas ou de Damiette ? On ne sait. On nous dit seulement qu'elle est située en Arabie, une Arabie romanesque où la précision géographique ne s'impose pas. A Damcar, Rosenkreutz entre en conférence avec les sages dont il a tellement entendu parler. Ceux-ci lui donnent à lire un livre étonnant qui est pour lui une véritable révélation : le Liber Mundi. ...

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