Drumont Edouard - Sur le chemin de la vie (souvenirs)


Auteur : Drumont Edouard
Ouvrage : Sur le chemin de la vie (souvenirs)
Année : 1914

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PREFACE. Un éditeur, qui est un ami, regrette que l'éphêmérité de l'oeuvre journalistique emporte pêle-mêle des articles dont quelques-uns auraient mérité de vivre davantage. Il me demande l'autorisation de réunir en volume quelques- uns de mes articles parmi ceux qu'il avait lus avec le plus de plaisir. Je lui accorde bien volontiers cette autorisation. Je sens aujourd'hui qu'il voudrait au moins, à défaut de mémoires ou de souvenirs, quelques lignes de préface. Je suis véritablement embarrassé de les lui donner. Sur le Chemin de la Vie, ainsi s'appelle le volume et, quand on s'aperçoit qu'on est au bout de ce chemin et que les souffrances vous avertissent qu'on n'en a plus pour bien longtemps, on n'a guère envie de recommencer la route, ne fût-ce qu'en la racontant. — « Parlez-nous un peu de vous » m'a dit mon éditeur. J'ai reproduit dans ce volume la généalogie de famille que j'avais rassemblée pour répondre à des pitreries de polémique juive. Ceux qui, dans l'avenir, voudront étudier et expliquer mon œuvre, qui a fait quelque bruit dans le monde, y trouveront toutes les indications désirables. Paysans, artisans, gardes-chasse, filandières, braves gens, y vécurent obscurément dans le travail et dans la prière, voilà ceux que je représente, voilà l'originalité de ma personnalité et de mon oeuvre. Les morts qui parlent, de Vogue, sont à mon cwis un des livres les plus profonds, les plus suggestifs de ce temps. Il n'est donc pas étonnant, dans ces conditions que je n'aie jamais pu réussir dans une société qui ne ressemble pas à la société d'autrefois, qui ne vit que pour l'argent. Tout en étant, par certains côtés, un Parisien malin, sceptique et très averti, j'avais un fonds de foi médiévale, naïve et sincère. C'est elle qui m'a poussé à me jeter dans la mêlée pour y défendre les crogances de mes aïeux, comme elle a jeté sur les champs de bataille ces chouans héroïques qui versèrent leur sang sans compter et qui finirent par être écrasés. C'est un fait qu'il semble quelquefois que Dieu ne protège guère ceux qui combattent en son nom. J'ai vu tomber autour de moi, sans avoir réalisé leurs espérances, les meilleurs et les plus dévoués: Coppée, Mérg, Ménard, Boisandré et bien d'autres. C'était vraiment un être exceptionnellement noble et bon que Gaston Mérg. En plein hiver, par des temps affreux, je le vogais quitter le journal, prendre le train, pour aller porter la bonne parole dans quelque réunion de la Ligue patriotique des Françaises que présidait la baronne de Vallard. Il semblait croire réellement à la parole de l'Eglise: Dieu bénit les nombreuses familles. Il aimait passionnément ses enfants: il ne vivait que pour ses enfants; il n'était heureux qu'en jouant avec eux. Je l'ai vu frappé en pleine jeunesse et j'ai vu la pauvre petite Suzanne, qu'il chérissait tant, enveloppée dans ses vêtements de deuil, me rappeler encore les parties qu'elle faisait avec son père. La veuve désolée, qui rêvait d'une vie heureuse avec lui, aurait connu la misère si Lépine, que nous avions tant de fois attaqué dans le journal, ne lui avait trouvé un petit emploi comme visiteuse des nourrissons de l'Assistance publique. Et ce pauvre Ménard, en a-t-il parcouru des kilomètres à travers la France pour passer des nuits en chemin de fer afin de défendre des prêtres et des religieux qui avaient eu recours à lui. A côté de cela, les sacripants, qui n'ont jamais fait que du mal, ont le bonheur, la santé, le succès. C'est à mes yeux d'écrivain que la destinée m'a frappé; c'est à la langue qu'elle a frappé le grand orateur chrétien qu'était Ménard. Dans la solitude de la campagne, torturé par la maladie, j'avais songé à évoquer ces figures. Je me suis aperçu que la colère et l'amertume donnaient un accent de révolte à mon langage et j'ai jeté au feu les feuillets qui étaient venus sous ma plume. Je n'ai pas voulu chagriner, même involontairement, les êtres bons et simples qui m'ont constamment témoigné leur sympathie par des lettres affectueuses et tendres, pleines d'éloquence et de coeur. Les prêtres des campagnes ont vraiment l'âme eucharistique de ces chrétiens d'autrefois dont j'ai parlé si souvent dans mes livres. Ce sont eux qui m'ont toujours encouragé et soutenu. Quant aux catholiques riches, je n'ai trouvé parmi eux que l'indifférence et la haine. Les Riches tiennent maintenant la place prépondérante dans cette Eglise qui a été fondée par les pauvres; ils ont peu à peu relégué au second plan ce Christ qui apparaissait à nos ancêtres comme une image de miséricorde et d'amour; c'est pour eux que la société actuelle semble faite: ils ont tous les triomphes, tous les succès, tous les plaisirs. Il est vrai de dire que toutes les colères se concentrent aujourd'hui contre les Riches comme elles se concentraient autrefois contre les Nobles. L'impôt sur le Revenu et le capital ne sont que des commencements. Composée d'éléments divers venus de points différents, cette caste des Riches n'en a pas moins une certaine homogénéité. Elle a l'orgueil et l'amour profond de l'argent de tous les possédants: elle est un mélange de l'âme juive et de l'âme bourgeoise en ce que cette âme a de bas et de vil, sans les qualités qu'avait la Bourgeoisie aux heures de la lutte et de la conquête. Nos prêtres disaient autrefois leurs vérités aux grands seigneurs les plus qualifiés et aux rois eux-mêmes. Nos prêtres d'aujourd'hui, ces prêtres simples et bons dont je parlais tout à l'heure, hésiteraient à dire de ces Riches ce qu'ils en pensent. J'ai cité jadis l'étude qu'avait publiée à ce sujet un ecclésiastique dans un journal de Belgique, où le clergé est plus indépendant et craint moins de choquer les puissances mondaines. Il nous montrait ces Riches se cramponnant à leurs richesses même lorsqu'elles ne peuvent plus leur procurer leurs jouissances habituelles, alors que la main déjà glacée par la mort prochaine n'a même plus la force de faire tourner une clef dans la serrure d'un coffre-fort. Les Riches ont de commun avec les grands seigneurs d'autrefois l'ingratitude et l'aversion pour ceux qui les défendent. Je n'ai jamcds rencontré parmi eux un bon mouvement, un acte de sympathie et de cordialité. Les legs faits au socialiste Bebel se montent à des millions. Jamais on n'a fait un legs à Veuillot. Un de ces privilégiés de la Fortune, un possesseur d'immenses domaines n'a jamais songé à me dire: « Vous avez beaucoup travaillé, vous devez avoir besoin de vous reposer. Je vous lègue une cabane et ces arbres pour vous abriter. « La vérité est que nos plus humbles prêtres sont plus près de Dieu que les millionnaires catholiques. C'est en eux que j'espère, c'est en leurs prières que j'ai foi. C'est encore un don spécial au'ont certains êtres de voir exaucer leurs prières. Le curé d'Ars était ainsi. Victor Hugo, auoiaue libre-penseur, avait foi dans les prières de dom Bosco. La comtesse de Saint Laurent me partait un jour à la maison d'une carmélite qui obtenait de Dieu tout ce qu'elle voulait. Elle aimait les fleurs et la neige. Quoiqu'on fût déjà en été, il tomba de la neige le jour où on l'enterra. Au premier abord, cela parait une de ces charmantes légendes comme il y en a tant dans la Vie des Saints. La comtesse de Saint Laurent est une femme si sérieuse et si droite que, malgré sa bonté profonde, je la crois incapable d'avoir inventé cette histoire. J'aime mieux croire qu'elle est vraie. Quoi qu'il en soit, je compte sur an de ces prêtres au cœur simple qui ont de l'influence sur Dieu pour parler en mon nom et pour lui dire: — « Ce pauvre Drumont a travaillé toute sa vie, il n'a pas écrit une ligne, dans cette vie, qui pût corrompre personne; il a défendu les traditions et les croyances qui ont fait la gloire de l'ancienne France. Comme vous ne l'aimez pas, vous ne lui avez jamais accordé aucune de ces faveurs temporelles que vous avez prodiguées à tant de coquins. Vous ne sauriez, dans ces conditions, demander qu'il joigne les mains tous les soirs en murmurant: Gratias ago tibi, Domine, pro universis beneficiis tuis. Ce n'est pas une raison pour lui refuser la seule chose qu'il vous demande; il désire disparaître le plus tôl possible de cette terre et il a assez travaillé pour avoir le droit de se reposer et de ne pas assister au spectacle des humiliations et des horreurs qui attendent une nation qui est absolument gouvernée par des Juifs. Epargnez-lui les douleurs préparatoires; soufflez dessus au moment où il s'y attendra le moins... En agissant ainsi, vous apparaîtrez, pour la première fois, dans une attitude de bonté dans cette existence douloureuse qui a été toute de travail et de luttes. » Edouard DRUMONT. ...

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