Guieu Jimmy - Demain l'apocalypse


Auteur : Guieu Jimmy (Guieu Henri-René)
Ouvrage : Demain l'apocalypse
Année : 1969

Lien de téléchargement : Guieu_Jimmy_-_Demain_l_apocalypse.zip

La Californie ? Une atmosphère d’étuve ! Telle fut l’impression de Raymond Dorval en sortant du studio à air conditionné qu’il avait loué au Verdugo Motel. Ce mois de juillet était Torride à Los Angeles et le motel au pied des Verdugos Mountains, offrait à ses hôtes une agréable fraîcheur, à défaut de leur procurer l’air des cimes ! A une trentaine de kilomètres du coeur de l’immense cité californienne, ces montagnes – peu élevées, il faut bien le dire – avec leurs pentes plantées de pins, de mimosas, d’acacias et d’eucalyptus, constituaient pour le touriste un agréable lieu de promenade. Mais pour les cent vingt congressistes venus de tous les coins du monde en ce district de Los Angeles, il n’était pas question de tourisme, mais bien plutôt de travail, ainsi que l’annonçait la large banderole déployée à l’entrée des jardins du motel : International U.F.O.’s Group Convention « Convention Internationale des Groupes d’Etude des Objets Volants Non identifiés ». Raymond Dorval, la trentaine, blond, le teint hâlé, des yeux bleus volontiers rieurs, aurait pu passer aisément pour un moniteur de culture physique avec son allure sportive et désinvolte ; ce qui n’excluait point chez lui une discrète élégance avec son costume gris perle et sa chemise blanche à col ouvert, ainsi que l’y autorisait la chaleur de l’été ! Un attaché-case à la main, son éternel appareil photographique suspendu en sautoir, Dorval se rendit au parking afin de récupérer un dossier resté dans sa voiture – une Ford Escort louée le matin même – et revint vers le bâtiment principal du motel, dans la grande salle duquel allait se tenir la convention. Dorval s’arrêta en pestant : une fois de plus, les lacets de ses souliers neufs s’étaient dénoués ! Il s’adossa à l’angle d’un mur, renoua les cordonnets et reçut dans le bas du dos une poussée qui faillit le faire choir ! Dorval put rétablir son équilibre et se retourna pour apostropher le maladroit venu buter sur lui : un homme d’une soixantaine d’années, le nez chaussé de lunettes dont les verres avaient dû être taillés dans un miroir de télescope ! Distrait et fort myope, celui-ci se confondit en excuses puis, avisant l’appareil prolongé d’un objectif semi-grand angle suspendu sur la poitrine de sa « victime », il arbora un large sourire : - Journaliste, sans doute ? - Congressiste, simplement. Mon nom est Raymond Dorval ; je représente l’I.M.S.A., l’Institut Mondial des Sciences Avancées et son département O.V.N.I.1 L’homme aux lunettes-hublots se renfrogna aussitôt, laissa retomber la main qu’il allait tendre au Français et, sans un mot, il lui tourna le dos pour se hâter vers la salle du congrès. Dorval demeura perplexe, choqué aussi par la moue subitement dédaigneuse de l’inconnu. Un rire clair, juvénile, le fit se retourner : devant le minois amusé de cette jeune femme aux longs cheveux bruns, il décida de retrouver sa bonne humeur. Vêtue d’une minirobe pastel au large décolleté, un porte-documents sous le bras, elle s’avança et lui tendit la main : - Monica Rimbaldi, envoyée par l’Ufficio d’Inchiesta sui Dischi Volanti2, de Rome, fit-elle, en anglais, avec une façon très latine de prononcer les « r ». Lorsqu’il se fut à son tour présenté, la jeune femme s’exclama, en français, cette fois : - Enfin, un « presque » compatriote ! Je ne suis pas fâchée de pouvoir m’exprimer dans la langue qui fut celle de ma mère ! - Vous parlez aussi fort bien l’anglais, Monica. Mais, dites-moi, ce n’est pas seulement parce que ce maladroit a failli me flanquer par terre que vous avez éclaté de rire ? - Non, Raymond, convint-elle en l’appelant par son prénom, aussi amicalement qu’il l’avait fait pour elle. J’ai compris que vous ne connaissiez pas ce… maladroit et cela m’a fait rire. - Vous le connaissez donc ? - De réputation, tout comme vous devez le connaître, d’ailleurs, puisque vous êtes vous aussi un spécialiste en espiologie. Ce gros bonhomme à lunettes n’était autre que le Dr Horace Jokerst. - L’animal ! rit-il à son tour. Je comprends alors sa réaction, son désir de me fuir comme un pestiféré ! Horace Jokerst, l’ennemi juré des ufologues3 du monde entier ! Le chef de file américain des anti-soucoupistes ! - Je vois que vous connaissez vos classiques, Raymond ! Un homme d’une trentaine d’années vint à leur rencontre, cheveux châtains assez longs, portant un costume de toile légère et la cravate dénouée ; tenue sans doute inélégante mais tellement excusable par cette chaleur. - En forme, Ray, pour cette première séance de travail ? fit-il en resserrant (comme à regret !) son noeud de cravate pour saluer aussi la jeune femme. - Tout à fait, Harry, répondit Dorval, en faisant les présentations. Harry Forrest, président de la Commission Delta pour l’étude des O.V.N.I., en Californie et organisateur de notre Convention internationale. Monica Rimbaldi, notre consoeur de Rome, Italie. Rome, Italie ! En Europe, une telle précision passerait aisément pour une évidence proche de la lapalissade alors qu’aux Etats-Unis il est courant, lors des présentations, d’ajouter son lieu d’origine ; précaution non superflue si l’on sait qu’il existe aussi en Amérique des « Paris », « Rome » et « Moscou » ! - Ravi de vous rencontrer, Monica, fit l’Américain. Nous correspondons tous depuis des années, mais cette Convention va enfin nous permettre de faire connaissance les uns les autres. Le monde des ufologues est une grande famille dont les membres, hélas ! doivent la plupart du temps se contenter d’établir simplement des relations épistolaires. Soyez la bienvenue à Los Angeles, Monica. - Merci, Harry. Je suis également enchantée à la perspective de pouvoir rencontrer ici tous nos collègues représentant les groupes d’études oeuvrant sur l’ancien et le nouveau continents. - Harry, savez-vous de qui nous disions du mal, juste avant votre arrivée ? L’Américain releva un sourcil, étonné, et secoua négativement la tête. - Du Dr Jokerst, le célèbre météorologiste et grand pourfendeur de soucoupistes devant l’Eternel ! Forrest releva alors les deux sourcils : - C’est pas vrai ? Il est ici ? Mais nous ne l’avons pas invité ! - Il se sera invité lui-même, voilà tout, comptant bien, selon son habitude, flétrir les pauvres en esprit, ivrognes ou farceurs que nous sommes, ainsi qu’il nous qualifie dans ses articles et conférences ! - Comment peut-il ignorer que notre congrès est strictement privé ? s’insurgea l’Américain. C’est seulement au cours de notre dernière séance, dans trois jours, que nous ouvrirons nos portes à la presse, au public et… à nos adversaires ! Bill Howard sera d’ailleurs au contrôle, afin de refouler toute personne non munie d’une invitation nominale. Au contrôle, effectivement, ils trouvèrent Bill Howard – vice-président de la commission Delta, un homme d’une quarantaine d’années, à la carrure de lutteur ! – qui entendait justement s’opposer à l’entrée du Dr Jokerst ! - Ah ! Tu tombes à point, Harry ! fit-il en voyant arriver son ami. - Oui, vous tombez à point ! rechigna le Dr Jokerst. Je proteste contre l’ostracisme de votre employé qui prétend m’interdire l’accès de… - Bill n’est pas mon employé, docteur Jokerst ! Nos groupes de recherches ne sont pas financés par le gouvernement et leur trésorerie modeste ne leur permet pas de s’adjoindre des collaborateurs rémunérés. Bill Howard est le vice-président de la commission Delta que j’ai l’honneur de présider et le secrétaire général de notre Convention. Ce congrès est exclusivement réservé aux spécialistes en ufologie. Avez-vous une carte d’invitation à votre nom ? - Mais bien sûr ! Et de brandir le bristol – parfaitement authentique – sur lequel loucha le président de la Convention. - Vous ne figuriez pas sur nos listes d’invités, docteur Jokerst, comment vous êtes-vous procuré cette invitation ? - Je ne me la suis pas procurée, monsieur Forrest, je l’ai reçue par la poste, dans cette enveloppe ! répliqua-t-il, outré par ces insinuations. La chose demeurant inexplicable, Harry Forrest dut s’incliner : - Soit… Je ne comprends pas comment cette invitation, nominale, a pu vous être envoyée, mais, du moment que vous l’avez, je ne puis vous interdire d’assister à nos travaux. - Vous êtes bien bon ! grogna Jokerst en rempochant le bristol pour pénétrer, hautain, dans la grande salle. - Un petit mystère qu’il faudra éclaircir, cette invitation ! rumina l’Américain. Tous les congressistes sont arrivés, Bill ? - Nous n’attendons plus personne. Les autres membres du comité de la Convention sont déjà sur le podium et n’attendent plus que vous trois. Le président Forrest, suivi par Raymond Dorval et Monica Rimbaldi, contourna le bâtiment pour emprunter une porte latérale donnant sur les coulisses. Derrière une longue table chargée de micros, ils prirent place parmi huit autres collègues et le rideau put alors se lever. L’assistance, composée des délégués des innombrables groupes d’étude envoyés par trente nations différentes, applaudit avec chaleur. Après avoir présenté les membres du comité international de la Convention assis à ses côtés, le président Forrest fit une courte pause et ajouta, avec une joie feinte : - Mes chers amis, avant de procéder à l’ouverture des travaux, je tiens à saluer la présence parmi nous d’une personnalité que nous connaissons bien. J’ai nommé : le Dr Horace Jokerst… Et de s’incliner en désignant le météorologiste qui, mécontent de cette publicité dans ce milieu « hostile », ne dut pas moins se lever pour répondre d’une sèche inclination de tête au salut du président. Il recueillit de maigres, de très maigres applaudissements et se rassit avec un mouvement d’humeur. - Le 24 juin 1947, commença Harry Forrest, l’un de nos compatriotes – Kenneth Arnold – aux commandes de son avion, observait les évolutions de neuf disques volants, au-dessus du mont Rainier, dans l’Etat de Washington. Depuis cette date, le terme de « soucoupes volantes » – que nous réprouvons tous, en raison de son petit côté dérisoire – est entré dans les moeurs, et les astronefs extra-terrestres que ce terme désigne sont entrés dans l’histoire. En trente-cinq ans d’observation, on estime grosso modo à cent millions le nombre des témoins oculaires dans notre pays et bien davantage dans le monde ! Mais à quoi bon vouloir diminuer ou grossir ce chiffre puisque, aujourd’hui, il ne fait plus le moindre doute que ces disques volants sont des E.S.P.I., des « Engins Spatiaux de Provenance Indéterminée », à savoir : des astronefs venus d’un autre système solaire et… Jaillissant de sa place comme un diable de sa boîte, le météorologiste lança : - Fariboles ! Prouvez-le ! Harry Forrest, qui s’attendait à ce genre d’interruption, conserva tout son calme pour répondre à l’interpellateur : - Docteur Jokerst, j’ignore par quel miracle vous avez reçu l’invitation qui nous force à tolérer votre présence parmi nous. Je tiens cependant à vous rappeler ceci : notre convention internationale n’est absolument pas une réunion publique et contradictoire. ...

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