Racine Paul - Benedetti Arnaud - J'ai servi Pétain Le dernier témoin


Auteurs : Racine Paul - Benedetti Arnaud
Ouvrage : J'ai servi Pétain Le dernier témoin Entretiens avec Arnaud Benedetti
Année : 2014

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Introduction. Paul Racine n’a pas 26 ans quand il fait le choix de se mettre au service du maréchal Pétain. Quasiment laissé pour mort au printemps 1940 sur les champs de bataille où les armées françaises ont combattu plus héroïquement que ne le suggèrent les images de la débâcle, il est un jeune homme révolté et humilié. Sa révolte, il la retourne contre une classe politique qu’il juge responsable d’une défaite que l’on disait improbable mais que l’état d’impréparation à la guerre a rendu inévitable. Son humiliation est le fruit amer de son impuissance de jeune sous-lieutenant à avoir vu ses hommes opposer leur poitrine à la mitraille des blindés dans les sombres forêts des Ardennes. Mais ses colères et ses blessures n’en font pas pour autant un homme désespéré car, comme des millions de ses compatriotes de l’époque, il perçoit, ainsi qu’il le dit lui-même, dans « La haute figure du Maréchal1 », qui vient de confondre son destin avec celui d’une France à terre, des raisons de croire. C’est cette adhésion que j’ai souhaité interroger. Pour quelles raisons et par quels cheminements un homme élégant, cultivé, empreint d’humanité a arrimé l’énergie de ses jeunes années à un régime aujourd’hui maudit dans notre mémoire. Écrite par les vainqueurs dont on sait depuis les Anciens qu’ils sont peu enclins à l’indulgence, l’histoire n’a pas pardonné. À l’aune de ses échecs moraux et politiques, comment pouvait-il en être autrement pour un État qui s’était tout à la fois compromis avec l’occupant, allant jusqu’à anticiper parfois des demandes inexistantes, fourvoyé avec les pires soutiens d’un nouvel ordre européen, aveuglé sur ses propres marges de manœuvre et avait prêté la main à la persécution des Juifs ? Le verdict ressortirait d’autant plus implacable qu’il évitait de se poser trop de questions sur le climat de cette France désormais si lointaine, sur les matrices d’un désastre, sur les moteurs des engagements des uns et des autres, sur l’attentisme de la plupart. Il ne faut pas s’y tromper. Ces conversations avec Paul Racine n’ont rien d’un exercice idéologique qui, chemin faisant, par petites touches subreptices, viserait à restaurer une vision plus aimable du moment vichyste. Cette histoire-là reste violente, tragique, abyssale, balayée par un vent terrible où ne résista aucune des catégories morales qui fondent aujourd’hui notre présence au monde, notre relation à la société, notre conception de l’individu. Pour autant, le caractère rétrospectif du jugement contemporain a quelque chose d’inachevé. Pénétré de notre seule sensibilité toute de compassion, de respect des droits de l’homme et d’attachement à la personne, nous oublions ce que ces années eurent inévitablement à concéder dans le fracas et la force des événements aux passions de l’instant, aux représentations antagoniques, aux doutes et aux incertitudes sur l’évolution du conflit. Du haut de notre présent, forts des connaissances et des informations accumulées, nous projetons nos convictions au fin fond d’un passé dont nous méconnaissons la profonde altérité. Sans doute afin d’appréhender de manière plus équilibrée la courbe de ces bouleversements faut-il alors accéder à ce « parti pris des choses » dont parle Francis Ponge dans son recueil éponyme de poésies : accepter entre autres que, si les hommes sont comptables des préjugés de leur époque, ils en furent aussi le produit ; relever la familiarité de ces générations avec le sacrifice, la mort et la tragédie de l’histoire, divinités presque naturelles pour des enfants nourris dans le souvenir de la Grande Guerre ; se résoudre à ce que des intentions si ce n’est toujours louables mais pensées comme rationnelles puissent accoucher de la catastrophe et pour finir se poser cette question sans y apporter, par humilité, de réponse : à leur place, qu’aurions-nous fait ? Les longues heures d’entretien avec Paul Racine, la relation si vivante de ses souvenirs, la franchise jamais biaisée de son propos ramènent à cette interrogation récurrente. Mais, au-delà, c’est tout un arrière-monde qui se dévoile, celui d’une France faite d’intrigues incessantes, de forces souterraines et contradictoires, de combinaisons et complots où s’entremêlent les audaces, les opportunismes, les non-dits, les suspicions, les jeux obscurs et dans tous les cas dangereux. C’est une France à l’air raréfié dont il est ici question, non pas parce qu’on y côtoierait les cimes mais parce qu’on s’y enfonce toujours plus souvent dans les profondeurs d’un pays qui se cherche, en vain, des raisons d’espérer. Les mots qui s’échappent sont le plus souvent « Devoir », « Abnégation » et, aussi surprenant que cela semble à un esprit de notre temps, « Résistance »… Paul Racine se présente indéniablement en homme de bonne foi. Sa mémoire est intacte et ses convictions le sont également. Maréchaliste il fut, maréchaliste il demeure, bien qu’avec le temps les arêtes les plus tranchantes des certitudes d’hier se soient quelque peu émoussées. C’est justement tout l’intérêt de son témoignage qu’il ne cherche ni à se justifier ni à se repentir. Lui, pendant que d’autres au même âge rejoignaient Londres ou les maquis, a décidé de consacrer ses jeunes années à la maison Pétain. Même fougue sans doute, même foi, une cristallisation patriotique souvent identique mais des engagements qui pour obéir à des ressorts proches n’en prirent pas moins des voies opposées. Quand les ombres de la clandestinité laissèrent la place aux lumières de la Libération, ceux qui avaient fait du vieux soldat le soleil de leur jeunesse tombèrent dans l’obscurité. La destinée de Racine n’est pas étrangère à celle d’un de ses contemporains, plus jeune de quelques années celui-ci, mais dont la figure au soir de sa vie se confond avec le marbre dans lequel on fige les héros. Ancien secrétaire de Jean Moulin, Daniel Cordier, comme Paul Racine, appartient à un milieu bourgeois, de droite, d’une droite patriote et souvent indignée par l’impuissance et la corruption de la IIIe République finissante. Il éprouvera au lendemain de la défaite de juin 1940 le même sentiment empreint de colère et d’humiliation, mais il en tirera un enseignement diamétralement inverse, rejetant avec force un armistice qui révulse alors sa conscience encore adolescente. Là où Paul verra dans le Maréchal, comme tant d’autres, le sauveur, Daniel n’y trouvera que compromission, abandon facile et appel à la révolte. Une seule forge, deux destins : à l’épreuve de l’histoire, les hommes se distinguent, se différencient et s’affrontent. La tragédie n’est jamais loin pour ceux qui s’engagent. ...

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